LYNDA AMADAGANA « NOUS VOULONS QU’AMADAGANA & PARTNERS SOIT UNE MARQUE SYNONYME DE QUALITÉ. »

Lynda Amadagana

Elle se définit d’abord comme une mère d’une petite fille de 2 ans. Ensuite, Lynda AMADAGANA, revêt sa robe, comme pour nous dire qu’elle est plus qu’une mère. Avocate d’affaires admise aux barreaux de Paris et du Cameroun, cette entrepreneure du secteur du droit a fait ses armes auprès des meilleurs. Diplômée d’un Master 2 en droit international obtenu à l’université de Paris X Nanterre, elle est passée tour à tour par les cabinets anglais Red Smith, Simmons & Simmons, et Clifford Chance, avant de rejoindre en 2014 le bureau parisien du cabinet américain Orrick, Herrington & Sutcliffe. Depuis 4 ans, elle est à la tête de son propre cabinet d’avocat, Amadagana & Partners, basé à Yaoundé avec une représentation à Paris. L’expertise en droit des affaires OHADA, et sa spécialisation dans les secteurs miniers, énergétiques et infrastructurels font d’Amadagana & Partners l’un des meilleurs cabinets d’avocats au Cameroun. Le cabinet a d’ailleurs été classé Tier 1 par The Legal et classé Excellent par Les Décideurs Leaders League en 2022, pour ne citer que ces deux distinctions. C’est avec le sourire et beaucoup de convictions que Lynda AMADAGANA a accepté de se raconter à nos lecteurs.

Qu’est-ce qui vous a poussé à vous mettre à votre compte ?
Après quelques années d’exercice en tant qu’avocate au sein de grands cabinets internationaux, j’ai eu l’appel du continent. En effet, j’avais pu remarquer que les grands projets structurants en Afrique, et singulièrement au Cameroun, n’étaient pour la plupart pas accompagnés par une expertise locale. Et qu’il y avait donc une place à prendre pour un cabinet juridique doté d’une expertise sectorielle, alliant la maitrise des standards internationaux a à une réelle connaissance du marché local. C’était une question de momentum, et je savais que si je ne le faisais pas j’aurais des regrets. J’ai pris le temps de construire ce projet et en 2019, nous avons fondé avec mon associé, Maître Charly Kwahou, le Cabinet Amadagana &Partners, spécialisé dans les secteurs de l’énergie, des mines, des infrastructures ainsi que du financement des grands projets. Le bureau principal du Cabinet est à Yaoundé, avec une représentation parisienne. Nous conseillons les investisseurs nationaux et internationaux sur leurs
projets au Cameroun et dans toute la zone OHADA.

Pourquoi avez-vous décidé de vous mettre à votre compte, puis d’avoir une représentation au Cameroun ? Était-ce à cause du fameux plafond de verre ?

Mes stages m’ont donné certains outils mais j’ai vraiment appris le métier d’avocat d’affaires au sein du Cabinet Orrick, dans le département. Energie et Infrastructures qui traite essentiellement des dossiers en Europe et en Afrique. Tout débute lorsque je suis envoyée en détachement, à plusieurs reprises, notamment au Cameroun, au sein du principal concessionnaire d’énergie du pays. Je commence à entrevoir l’intérêt de travailler directement dans mon pays natal. J’ai eu une opportunité offerte par un fonds d’investissement opérant au Cameroun (le Groupe Actis), qui cherchait une directrice juridique. Je suis donc revenue au Cameroun en tant qu’avocate ayant pour principal client ce fonds d’investissement. Cette opportunité s’est combinée à des ambitions plus personnelles et une volonté d’être au plus près des réalités de mon pays et avoir un impact plus grand sur place. La problématique du plafond de verre n’est donc pas vraiment entrée en ligne de compte, car j’avais de belles perspectives de carrière en France.

Quelles sont les avantages et les inconvénients d’être entre la France et le Cameroun ? Avez-vous le meilleur des deux mondes? Existe-t-il des difficultés à gérer un cabinet ayant deux représentations ?

Oui je considère que j’ai le meilleur des deux mondes. Ce n’est pas toujours évident surtout avec la vie de famille, mais à titre personnel, je considère ma double culture comme une richesse, qui trouve son prolongement et son expression dans les valeurs du Cabinet, dont l’objectif est d’allier une expertise internationale à un fort ancrage local

Lynda Amadagana

Quel est l’objectif d’Amadagana and Partners sur le long terme ?
Notre Cabinet espère pouvoir continuer à offrir à ses clients la qualité et l’excellence dans ses services qui constituent sa marque de fabrique et à avoir un impact sur le développement économique de notre pays, le Cameroun, à travers les grands projets que nous structurons. Nous avons également pour ambition d’ouvrir des bureaux dans d’autres pays de la zone OHADA et au Moyen-Orient. Nous possédons déjà un bureau à Paris et une représentation à Kinshasa. Notre vœu est donc de poursuivre sur cette lancée d’expansion régionale et internationale. Nous voulons devenir une firme à l’échelle africaine puis internationale, et qu’Amadagana & Partners soit une référence, une marque synonyme de qualité made in Cameroon et Africa. Il y a quelques années, les statistiques permettaient de dire que l’Afrique se réveillait et qu’elle connaîtrait un boom économique.

Vivons-nous réellement le réveil du géant africain tant annoncé ?
Nous en sommes aux prémices. Mais pour les observateurs avertis, le réveil imminent de l’Afrique est une évidence., Le dynamisme, la créativité et l’optimisme sont aujourd’hui du côté de l’Afrique, qui est devenue une sorte d’immense laboratoire qui possède tous les atouts de l’émergence et où se joue l’avenir de la planète. Les investisseurs potentiels sont chaque jour plus nombreux, attirés par l’immense potentiel du continent, en termes de ressources naturelles (énergétiques, minières) et humaines (une jeunesse croissante, formée et innovante). Bien entendu, la réalité de l’Afrique est complexe et les obstacles, sur le chemin du développement, sont nombreux, mais le continent s’inscrit dans une dynamique pleine de promesses.

Votre cabinet conseille également les entreprises et les états dans le secteur énergétique et minier. Quel est votre opinion sur le défi énergétique que connaît le Cameroun (le continent Africain) en ce moment ?

Le Cameroun et plus largement le continent africain se trouvent confrontés à la tendance du désinvestissement des énergies fossiles. Dans les hydrocarbures, nous observons depuis plusieurs années un recul de l’exploration et du développement de nouveaux grands projets, ainsi qu’une augmentation des cessions de leurs actifs africains par des acteurs historiques. Plusieurs raisons peuvent motiver ces choix: D’abord le retrait de certains investisseurs et banques des énergies
fossiles, ensuite l’adoption par les entreprises de politiques visant la neutralité carbone, enfin des considérations financières quant à la rentabilité des projets coûteux (offshore profond, pipelines transfrontaliers,etc.) face au faible prix du baril. Parallèlement, les projets hydroélectriques gagnent du terrain, attestant du fort intérêt des investisseurs pour ce secteur à fort potentiel. Ils offrent aux États l’occasion de relever le double défi d’utiliser leurs ressources naturelles comme levier de déve-
loppement tout en préservant leur environnement.

Parlons du secteur minier, est-ce qu’il y a des bonnes pratiques qui ont été mises en place pour rendre le secteur transparent, notamment dans l’attribution des permis ?
La transition énergétique a entraîné une hausse du prix des minerais, ce qui se révèle être une opportunité pour l’industrie minière en Afrique. Dans les pays où les problématiques de corruption, de traçabilité et de conditions d’extraction sont les plus aigües, il revient aux États concernés d’implémenter des bonnes pratiques. Afin d’attirer plus d’investissements, le Cameroun notamment a mis en place une règlementation transparente, des facilités administratives, un cadre fiscal attractif et le renforcement des infrastructures pour soutenir les activités d’exploitation, d’exploration et de développement minier. Dans les années à venir, le gouvernement prévoit de développer le secteur minier en renforçant la sécurité des conventions minières et de soutenir activement les meilleures entreprises locales. Le message à la Nation du Chef de l’Etat pour l’année 2023, qui a mentionné pas moins de trois grands projets miniers, a d’ailleurs mis en lumière le caractère stratégique du secteur minier
pour le développement de notre pays.

Pensez-vous que les PPP (Partenariats-Publics-Privés) soient la seule voie permettant de réaliser les grands projets liés aux infrastructures du continent ? Doit-on penser à des modèles de financement plus innovants ? Si oui, lesquels ?

Les PPP demeurent la voie royale car ils disposent d’une réglementation transparente et ont été éprouvés dans de nombreux secteurs (transports,infrastructures, péages). Toutefois, il existe effectivement des modèles de financement alternatif pour les projets, telles les obligations vertes qui sont des emprunts émis sur le marché par une entreprise ou une entité publique auprès d’investisseurs pour lui permettre de financer ses projets contribuant à la transition écologique (énergies renouvelables,
efficacité énergétique, gestion durable des déchets et de l’eau), plus particulièrement les investissements en infrastructures.

Lynda Amadagana

Vous êtes avocat d’affaires dans un pays où la profession est considérée comme noble, mais parfois n’intervient qu’en dernier recours. Comment changer la perception des africains quant à la fonction de l’avocat ? Comment faire pour que celui-ci soit d’abord perçu pour sa qualité de conseil, et non pour celle de sapeur-pompier ?

Je crois que ce changement de perception passe par une meilleure information du public, et ensuite par une modernisation et une structuration  de la profession. Un cabinet d’avocats est avant tout une entreprise qui a besoin de locaux décents, d’une organisation efficiente, d’une communication dynamique et surtout d’une vision de développement pour proposer une gamme de services basée sur des spécialisations sectorielles. Si l’organisation générale de la profession progresse en termes de structuration et de visibilité des cabinets, comme c’est le cas depuis quelques années, la perception du public s’améliorera automatiquement.

Quel est l’acte le plus audacieux posé par le cabinet jusqu’à présent ?
L’audace est au cœur de notre vision, et nous avons dès le départ entrepris de dynamiser notre belle profession. Nous nous considérons comme un acteur de notre communauté et avons eu à cœur d’agir en ce sens.

Le dernier acte en date est l’organisation du Forum Avenir 2023 à destination des étudiants en droit au Cameroun.
Quelle est la réalisation dont vous êtes le plus fière ?
A titre personnel, ma plus belle réalisation est d’être devenue maman. En ce qui concerne le Cabinet, je suis fière de tous nos dossiers, parce qu’ils sont le témoignage de la confiance et de la fidélité de nos clients. Néanmoins, s’il me faut en choisir un, je citerai le contrat de partenariat public-privé entre l’État du Cameroun et un consortium français. Nous avons accompagné localement le consortium français dans ses négociations avec l’État pour le financement, la construction et la maintenance
de 14 gares de péage autoroutières. Le contrat a été signé et les travaux sont en cours. C’est un projet à fort enjeu qui va révolutionner le paysage routier camerounais.

Quelles sont les défis que vous rencontrez en tant que femmes avocats d’affaires dans un environnement de plus en plus
concurrentiel ?
Je travaille en tant qu’avocate d’affaires dans un environnement nom seulement concurrentiel mais surtout étiqueté comme étant à prédominance masculine. Le fait d’être une femme jeune, peut surprendre mais la compétence est toujours valorisée.
En tant que femme, il me faut donc repousser chaque jour toutes les limitations qui pourraient m’être imposées du fait de mon statut, tout en gardant notre identité féminine. En tant qu’avocate, je dois faire preuve d’une extrême discipline, de persévérance, d’un sens de l’innovation poussé, pour m’adapter aux évolutions du marché. Il est également essentiel de trouver un équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle.

Comment voyez-vous l’avenir des femmes avocat d’affaires ?
Je vois les femmes s’imposer de plus en plus à la tête des cabinets d’avocats d’affaires, comme c’est le cas actuellement au Cameroun, où de nombreux cabinets sont dirigés par des femmes. Elles ont un style de management particulier qui allie la passion, un soin particulier de la clientèle, et un sens du service poussé. L’avenir est donc radieux !

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