Rétrospective 2015 : Les ‘Amitiés’ Africaines

2015 : ‘annus horibilis’?

Les réminiscences de l’année écoulée éveillent en nous des torrents de larmes que nous imaginions asséchés.

Y aurait-il un hommage ou un requiem suffisamment vibrant pour honorer la mémoire des victimes – civiles et militaires – de la crise Ebola, de la crise migratoire et de la barbarie de Boko Haram , Al-Shabbaab ou Al-Marabitoune? Ces ‘guests stars’ mortifères de l’année 2015 ont mis en exergue la perfectibilité du système de santé africain, mais aussi la nécessité d’une solidarité sous-régionale plus accrue en matières sanitaire, migratoire et militaire.

Bilan cumulé de ces cataclysmes, des dizaines de milliers de morts: 4800 d’Ebola; 3692 morts ou portés disparus dans la Méditerranée; 3 500 victimes civiles imputables à Boko Haram seul; sans compter le flux migratoire intracontinental inhérent à cette activité terroriste, qui se chiffre en millions de réfugiés.

Garissa, Monrovia, Lampedusa, Bamako, Fotokol, Mora, Konduga, Kukawa – la liste n’est pas exhaustive – résonnent encore à nos oreilles comme des dynamites qui nous plongent irrémédiablement dans le tourment.

Mais vivre c’est espérer, et l’Afrique est résiliente par nature.

Opposant  la vitalité de sa jeunesse aux gémonies auxquelles elle est vouée, elle a puisé dans la force mentale de ses masses populaires pour susciter – sinon l’admiration – l’intérêt de partenaires qui ont choisi de parier sur Elle.

L’Afrique Economique et Entrepreneuriale au centre des débats

La carte mondiale des polarités a été repiquée en 2015 par une série de rencontres inédites, consacrant le changement de regard sur l’Afrique.

Ainsi avons-nous entamé l’année sur les cendres chaudes du Sommet Turquie -Afrique de Malabo (19 – 20 Novembre 2014) et du 1er Forum économique de la francophonie à Dakar (1er – 2 décembre 2014). Pour ce dernier, l’objectif était de mettre en lien les acteurs économiques de l’espace francophone, d’évoquer les enjeux de la Francophonie économique, ainsi que ses perspectives de développement. Avec 31 membres sur 80 au total, l’Afrique est le continent le plus représenté au sein de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF). Elle pourrait donc en devenir le ‘hub’ économique, d’autant plus que son potentiel démographique en fait une force pour l’organisme qui recense aujourd’hui 274 millions de francophones à travers le Monde, et envisage 767 millions de locuteurs d’ici à 2060, dont 85% en Afrique.

Le Sommet Mondial de l’Entrepreunariat (GES) de Naïrobi (25 – 26 juillet 2015) – le 2ème en Afrique en six (06) éditions – a aussi été un temps fort de l’année africaine Grand’Messe de la promotion du modèle américain de développement économique par l’entreprenariat – avec en maître de cérémonie Barack Obama – il a été le théâtre d’expression pour 1000 entrepreneurs et 1400 délégations du monde entier – dont 700 de l’Afrique -. Enième clin d’œil des Etats-Unis au continent africain, la rencontre était aussi un prolongement du Sommet Etats-Unis – Afrique d’août 2014, qui avait permis de dégager une enveloppe de 33 milliards $ de promesses d’investissement pour le continent, secteurs public et privé confondus.

A ceux-là, il faut rajouter le IIIème Sommet Inde-Afrique de New Dehli (26 – 29 octobre), octroyant une ligne de crédit de 10 milliards de dollars ainsi que  50 000 bourses académiques pour les cinq ans à venir aux Africains; le IIIème Forum Brésil-Afrique à Recife (19 – 20 Novembre) sur « les défis et opportunités pour la fourniture d’Energie au Brésil et en Afrique »; ou encore le Forum sur la Coopération Sino[1]-Africaine de Johannesburg (décembre) aboutissant à 60 milliards de dollars de promesses de financements[2] et à un programme de formation de 200.000 techniciens en Afrique et de 40.000 autres en Chine.

Autant de rencontres qui ont laissé miroiter à l’Afrique une reconsidération des termes de ses échanges avec ses partenaires – anciens et nouveaux -. Mais les entrepreneurs africains en ont-ils été les grands gagnants?

Vers un maillage infrastructurel intra-africain

L’Afrique est le champ d’expérimentation de ces combattants du fatalisme qui rivalisent d’ingéniosité pour la réinventer.

Seul des infrastructures à l’échelle continentale précèderont un développement uniforme de l’Afrique et feront tomber les barrières douanières, mais aussi le coût exorbitant du transport des biens et  des personnes qui ralentissent tant l’expansion des entrepreneurs africains. En 2015, des initiatives cruciales ont été prises en ce sens.

Ainsi, à l’aube de l’année – le 27 janvier 2015 – l’Union Africaine (U.A) et la Chine ont signé un protocole d’accords pour un projet titanesque d’infrastructures. Destiné à relier les capitales africaines par autoroutes, train à grande vitesse et  liaisons aériennes, l’agenda de réalisation effective du projet a été fixé à 2069. D’après la Présidente de la Commission de l’Union  Africaine, Nkosazana Dlamini-Zuma: ‘C’est le projet le plus important jamais signé par l’Union Africaine avec un partenaire.’[3] Pour ne citer que le secteur ferroviaire, c’est l’ultime étape d’une série de projets impliquant la Chine et qui inclut déjà: 2200km de voie ferrée à travers le continent, plus un millier de kilomètres en travaux; et un contrat de 12 milliards de dollars signé par China Railway Construction (CRC) avec le Nigéria en novembre 2015, pour la réalisation de 1400km de voie ferrée.

Même s’il a du plomb dans l’aile à cause d’une procédure judiciaire lancée après la signature-  le 13 août 2015 – d’une concession entre le Bénin, le Niger et le groupe Bolloré, le projet de la ‘boucle ferroviaire’ de l’Ouest africain poursuivait son bonhomme de chemin au rythme de 3 à 4 km/jour de chemin ferré construit. Lancé en avril 2014 par le groupe Bolloré, le chantier de 2.5 milliards d’euros reliera à terme sur 2700 km, cinq (05) villes principales de l’Ouest Africain: Abidjan, Ouagadougou, Niamey, Cotonou et Lomé. La réalisation du projet est prévue pour 2019.

Et que dire du secteur énergétique, du secteur portuaire ou du  secteur aérien en Afrique en 2015!

La toile africaine se tisse tout doucement et sollicite au premier chef les entrepreneurs africains.

2016 sera une année bissextile. Avec un jour de plus, gageons qu’elle les poussera à se surpasser pour réaliser 365+1 prouesses.

Louis Gilbert Bissek

[1] Le chiffre d’affaires du commerce sino-africain représente 210 milliards

[2] Dans les domaines de l’agriculture, de l’industrialisation, de la réduction de la pauvreté, de la santé, de la culture, de la sécurité, de la protection de la nature ou encore du développement vert.

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