Caroline Hien, fondatrice de Carol’s : « J’ai appris à lire et à écrire à 25 ans »

En 2015, sans le vouloir, Caroline Hien pose les bases de sa marque de produits agroalimentaires et cosmétiques. Aujourd’hui, les produits naturels Carol’s sont dans des milliers de cuisines en Afrique et ailleurs dans le monde. Pour les amoureux des goûts afros, la marque Carol’s est le symbole de la valorisation des produits made in Côte d’Ivoire. Nous avons rencontré ce bout de femme pleine de ressources. Elle nous a raconté son histoire…

Jeudi 11 octobre, nous avons rendez-vous avec Caroline Hien, fondatrice de Carol’s Produits Naturels. A notre arrivée à la Riviera Jardin, dans la commune de Cocody, nous sommes accueillis par Stefan Meisel son époux. Il est 17h30 lorsque nous arrivons à son domicile qui lui sert également d’usine de transformation. « Il est temps de trouver un local pour son usine. Ici c’est la maison. », plaisante son époux. Pour Caroline et ses trois employées, c’est la fin de la journée. Elles rangent les ustensiles, se changent, émargent sur la fiche d’émargement avant de se souhaiter « bonne soirée » ! Le lendemain, une longue journée les attend.
Mais pour Caroline, le coucher du soleil ne rime pas toujours avec la fin de ses activités. Ce jeudi soir-là, la chef d’entreprise est invitée par l’ONG Empow’Her dans son espace de coworking, Assoya. En effet, une rencontre entre entrepreneures y a lieu. Caroline participe à la rencontre en tant que speaker. Elle y partagera son expérience d’entrepreneure autodidacte. 18h15, nous voici à l’Espace Assoya, dans la commune de Marcory. Caroline est accompagnée par son mari, sa sœur cadette et sa fillette. Après les échanges de civilité, les participantes sont impatientes d’entendre l’histoire de Caroline. Mieux, elles sont ravies de mettre enfin un visage sur la marque des délicieuses confitures qu’elles consomment déjà.

L’ivoirien Moulaye Fanny se rêve en porte étendard d’une pâtisserie fine à l’Africaine

Entrepreneure malgré elle

Caroline ne peut parler de ses gammes de confiture sans revenir sur son expérience personnelle avec la confiture. Quand elle rencontre son époux, il lui fait découvrir la confiture à la fraise qui ne l’emballe pas vraiment : « Je n’aimais pas, mais je ne pouvais pas le dire à mon époux » ; explique-t-elle. Même si elle ne le dit pas de façon directe à Stefan, Caroline fait comprendre à son homme qu’elle veut bien consommer de la confiture, mais avec d’autres saveurs. Le fruit qu’elle a toujours pris plaisir à consommer est la mangue. Elle posera une question banale mais qui sera décisive pour son avenir. : « J’ai demandé à mon mari si on pouvait faire de la confiture à la mangue ». Ce dernier répond par l’affirmative. Très vite, Caroline se met à la fabrication de confiture à la mangue. « La mangue parce que c’est un fruit très accessible ici et c’est ce qu’on mangeait quand on avait rien à manger » ; se souvient-elle.
L’idée de Caroline n’était pas de commercialiser la confiture qu’elle fabriquait. Cependant, notre héroïne se retrouve avec un stock important de confiture qu’elle et sa petite famille ne peuvent consommer. « Quand je me mets à faire quelque chose, je ne peux plus m’arrêter. Le travail me permet d’évacuer mes vieux démons » ; justifie Caroline. Elle fait découvrir ses confitures à ses amis qui sont conquis. Mais lorsqu’il faut se constituer en entreprise et professionnaliser la marque, Caroline doit relever un défi majeur. « Mon mari m’a conseillé de noter la composition de mes recettes et étiqueter les boîtes de confiture. Mais c’était difficile parce que je ne savais ni lire ni écrire ». Pour la jeune femme de 25 ans de l’époque, l’analphabétisme est un handicap qu’il faut absolument surmonter. Son autonomie en dépend ! Ainsi, avec les encouragements de son conjoint, Caroline se met à l’alphabétisation : « J’ai appris à lire et à écrire à 25 ans. Il était difficile pour moi d’apprendre à lire. Mais je l’ai fait et je continue encore aujourd’hui ». Et malgré toutes les sollicitations, « tous les dimanches, je prends des cours à domicile ». 

Carol’s en Côte d’Ivoire, Les Petits Pots de l’Ogooué au Gabon

Carol’s, une marque en pleine expansion

Enregistrée en juin 2015, Carol’s s’agrandit très rapidement et se convertit en juillet 2016 en société à responsabilité limitée (SARL). Dans le même temps, elle ajoute à sa gamme de produits des épices africaines. En 2017, la marque se dote d’une ligne de cosmétiques à base d’huile de coco et de beurre de karité.
Aujourd’hui, Carol’s compte environ 50 produits – confitures artisanales, cosmétiques et épices africaines. Aussi, l’atelier s’adapte aux nombreuses commandes tout en peaufinant le design de ses 80 conditionnements pour les rapprocher plus de l’Afrique et de sa culture. Pour le bonheur des consommateurs, les produits de la marque Carol’s sont présents à Abidjan et à Ouagadougou dans les grandes surfaces, des boutiques artisanales, dans les hôtels du Groupe Accor et également en ligne.

Une initiative récompensée…

Une telle hargne d’être utile à sa communauté ne peut passer inaperçue. C’est à juste titre que les efforts de Caroline Hien sont récompensés. La jeune entrepreneure, en trois ans d’existence a déjà remporté quatre prix locaux d’entrepreneuriat : le 1er Prix du Patronat, le 1er Prix de la Fondation Total (Startupper de l’année 2016), le prix Alassane Ouattara de l’entrepreneur émergent (2016), le  Diplôme de l’Institut Européen de la Coopération et de Développement (IECD) pour la transformation (2017).
Ce qui fait la singularité de Caroline Hien, c’est qu’elle travaille exclusivement avec des produits locaux, sans additifs tout en respectant l’environnement et en mettant un point d’honneur sur la production de qualité en Côte d’Ivoire. Guidée par la patience, l’humilité et l’amour qu’elle partage autour d’elle, Caroline est convaincue que si elle n’apporte rien, elle « ne sert à rien ».

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